Dans un communiqué en date du 10 juin 2024, le président de l'exécutif de la collectivité de Martinique s'adresse à ses compatriotes « avec le cœur brulé, la bouche amère » .
« Nous, gens des Antilles descendants de peuples amérindiens génocidés, fils d’africains déportés dans les enfers esclavagistes,[…] nous avons traversé́ des siècles de souffrances, de luttes incessantes mais aussi d’héroïsmes entêtés et de résiliences marronnes », écrit Serge Letchimy. Déclarant que « Voter pour l’extrême-droite est une trahison de ce formidable héritage. La haine ne saurait donc passer par nous ».
Il est assez aisé de comprendre l’indignation du président de la collectivité de Martinique suite aux résultats des élections Européennes qui ont placées le Rassemblement National largement en tête du scrutin en Guadeloupe, en Guyane, à la Réunion, à Mayotte. Sauf en Martinique où la liste menée par Jordan Bardella arrive deuxième, pas très loin après LFI.
Vote de contestation, en réaction par rapport à la politique d’Emmanuel Macron et de son gouvernement ? C’est une explication avancée par de nombreux observateurs. Mais au-delà, il s’agit d’un besoin d’ordre, de protestation contre un pouvoir d’achat, même si dans certains chiffres est en hausse, ne cesse de diminuer dans la réalité des ménages. Et que dire de cette immigration et de cette insécurité grandissante.
« L’extrême-droite, dans sa rhétorique et ses actions, prône la division, l’exclusion et la haine. Elle se nourrit des flammes du racisme, du mépris de l’Autre, de la xénophobie, celles-là mêmes qui ont tenté de nous réduire au silence, à la servitude et, aujourd’hui, à la déresponsabilisation » poursuit Serge Letchimy.
Mais que dire alors du Parti Communiste ? Pourquoi ne pas aussi rappeler les années sombres du PCF. La mémoire communiste, elle, entretient volontiers le souvenir d’un parti cerné, assiégé de toutes parts, qui ne s’est pas exclu mais a bel et bien été exclu de la communauté nationale par la classe politique. Si Serge Letchimy souligne le passé du RN en affiliation directe avec le FN, il devrait aussi rappeler Staline. Ce dernier a été l’artisan d’une peur généralisée : vague de « Grande Terreur », élimination des opposants politiques et des élites, ou encore déportations massives dans les camps de travail forcé… La collectivisation des terres, quant à elle, a engendré de terribles famines, comme en Ukraine. Les estimations des historiens varient, mais on considère généralement que le régime stalinien a fait entre 15 et 20 millions de morts, en incluant ceux qui ont perdu la vie au cours des différentes famines. Ce macabre décompte intègre des catégories de victimes bien différentes. Plus de 1 million de personnes furent tout simplement exécutées, en particulier lors de la « Grande Terreur » de 1937-1938, souvent pour des motifs politiques.
Et que dire du Parti Socialiste ? Ne faut-il pas là aussi rappeler l’histoire ? Pourquoi un homme aussi brillant et ambitieux que François Mitterrand s'est-il entouré, après la Libération, de personnages sulfureux, mouillés dans la collaboration, au risque de compromettre définitivement sa carrière ? Le président socialiste de la Ve République a même continué à fréquenter d'anciens responsables de la Cagoule, cette organisation criminelle et fascisante démantelée en 1938. François Gerber, auteur de Mitterrand, entre Cagoule et Francisque, peine à répondre à cette question. Est-ce, tout simplement, parce que François Mitterrand éprouvait une réelle fascination pour René Bousquet, l'ancien secrétaire général de la police sous Vichy, impliqué dans la traque des juifs et des résistants, notamment dans la rafle du Vel' d'Hiv' ? Les connexions de François Mitterrand étudiant avec l'extrême droite avant-guerre sont connues du grand public, depuis l'ouvrage de Pierre Péan, Une jeunesse française, paru en 1994. Tout comme son passage à Vichy, si longtemps occulté. On savait également qu'il avait été embauché, peu après la Libération, par Eugène Schueller, patron de L'Oréal et ancien financier de la Cagoule, en tant que rédacteur en chef du magazine Votre beauté. En revanche, comment imaginer que ce jeune homme, qui aspire aux plus hautes fonctions de l'État, prenne des risques insensés pour s'entourer d'admirateurs du maréchal Pétain et de fanatiques de la collaboration avec l'Allemagne nazie ? Or François Mitterrand « assume des fidélités envers et contre tous ». Et ça, Serge Letchimy ne le souligne pas dans son communiqué.
Et que dire de LFI ? Cette pseudo France Insoumise politique qui ne reconnait pas le pogrom du 7 octobre. Pour qui le Hamas est un mouvement de résistance. Un parti qui sous couvert de défense de la Palestine, ne reconnaît pas l’Etat démocratique d’Israël, de ses enfants, jeunes femmes violées, démantelées, brûlées. LFI a principalement fait campagne autour de ces thèmes abjects avec sa prêtresse Rima Hassan, effaçant de fait sa tête de liste Manon Aubry. Et ça, Serge Letchimy ne le souligne pas dans son communiqué. Il ne souligne pas non plus la forte influence d’un Jean-Luc Mélenchon pour qui la police tue. Un shaman qui tire les ficelles de ses marionnettes à l’Assemblée Nationale, dictant les mots et les comportements subversifs de ses poupées en culotte courte. Les poussant dans les rues, les établissements scolaires et les media choisis pour cracher leur haine. Pourquoi ne pas le souligner monsieur le président Letchimy ? Peur d’être qualifié d’extrême droite ? Mais quelle en est votre définition ?
Et enfin que dire de ce Front Populaire, une Nupes bis avec un rallié de poids dans cette soupe à la grimace. Pourquoi ne pas avoir rappelé monsieur Letchimy, la prise de position du NPA au lendemain de l’attaque du mouvement islamiste palestinien Hamas contre Israël du 7 octobre 2023. Dans un communiqué, le Nouveau Parti Anti capitaliste avait alors indiqué soutenir les Palestiniens et tous les « moyens de lutte qu’ils et elles ont choisis pour résister ». Et d’ajouter : « La gauche devrait se rappeler la nécessaire solidarité avec les luttes de résistance contre l’oppression et l’occupation. »
Et voici que que François Hollande, l'ancien président de la République pactise avec le Front Populaire, pactise avec le grand tribun Jean-Luc Mélenchon qui tire encore et toujours les ficelles pour imposer sa doxa. François Hollande veut aussi goûter à la soupe, lui qui a fui ses responsabilités en lâchant le PS, en abandonnant la bataille face à Macron.
Et voici que Raphaël Arnault, le leader - fiché S - de la Jeune Garde, mouvement violent d’extrême gauche, et proche de Jean-Luc Mélenchon, est parachuté à Avignon pour les élections législatives, malgré l'hostilité de la gauche locale. Il faut dire que le CV du bonhomme est gratiné. Outre son comportement violent — qu’il ne cherche pas à dissimuler –, Raphaël Arnault est fiché S et a été appelé à s’expliquer devant la police pour des accusations d'« apologie du terrorisme ». Ces accusations font suite à ses multiples expressions de soutien à la Palestine pendant le conflit à Gaza. Sur sa page X (anciennement Twitter), il a tenu des propos légèrement conspirationnistes, en accusant l’Organisation juive européenne d’être responsable de sa convocation policière.
Et voici que Adrien Quatennens, député sortant de la 1ère circonscription du Nord, condamné en décembre 2022 à quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour violences conjugales est investi par Mélenchon. Son cas faisait débat à gauche, notamment chez les socialistes et écologistes, mais ce fidèle du leader des Insoumis a bien été reconduit.
Et voici que Babette de Rozières se présente aux élections législatives sous les couleurs des Républicains et du Rassemblement national. Cheffe cuisinière très connue, l'ancienne proche de Valérie Pécresse et conseillère régionale depuis 2015, veut elle aussi sa part de soupe. En tout cas pour l'heure elle met bien les pieds dans le plat ! Beaucoup de ses compatriotes d'Outre-mer ont réagi. « Non vraiment Babette, ce n’est pas chouette, ça fouette ! Ça fouette la soupe rance ! Tout mais pas ça ! J’ai honte pour nous tous » , lui a confié Michel Reinette, scénariste et journaliste guadeloupéen, dans un courrier.
Lors de ces élections législatives anticipées du 30 juin et du 7 juillet 2024, seuls les électeurs décideront. Mais il était fondamental de rappeler l’histoire des partis, partout sur l’échiquier politique, à droite comme à gauche.
« L’enfer, c’est les autres » disait Sartre. C’est loin d’être une parole d’évangile.