Les députés ont voté jeudi 29 février à l’unanimité une proposition de loi établissant la responsabilité de la France dans les ravages qu’a fait le pesticide Chlordécone en Guadeloupe et Martinique. Un premier pas important pour Elie Califer, le député socialiste porteur du texte.
Classé « cancérogène possible » par l’OMS dès 1979, ce pesticide serait responsable d’une explosion des cancers de la prostate aux Antilles où plus de 90 % de la population adulte est contaminée, selon Santé publique France. En Martinique et en Guadeloupe, le sujet cultive, depuis des années, une profonde défiance des populations vis-à-vis de l’Etat. « Le symbole est grand, le texte est un pas vers la guérison de deux populations en souffrance depuis trop longtemps », a convenu Maud Petit (MoDem, Val-de-Marne).
Aux Antilles, où le non-lieu prononcé en janvier 2023 par deux juges d’instruction parisiennes enquêtant sur le scandale avait provoqué beaucoup d’amertume, le vote a été scruté de près. Elie Califer, à l’origine de la proposition de loi, s’insurgeait, entre-temps et dénonçait « une réécriture » du texte. « C’est inacceptable. Ça va être un bras de fer ».
Responsable de cancers de la prostate notamment, ce produit avait été interdit en métropole en 1990 mais avait continué à être utilisé jusqu’en 1993 aux Antilles, en particulier dans les plantations de bananes. Avec 227 cas sur 100 000 habitants, la Martinique détient en effet le record du monde de ce type de cancer, qui a été reconnu comme maladie professionnelle en décembre 2021.
En 2006, plusieurs associations martiniquaises et guadeloupéennes avaient déposé une plainte contre l’État français pour empoisonnement, mise en danger de la vie d’autrui et administration de substance nuisible. Une information judiciaire avait été ouverte au tribunal judiciaire de Paris en 2008.
La proposition de loi socialiste, portée par le député de Guadeloupe Élie Califer, a été votée à l’unanimité des votants, les groupes de la majorité s’étant abstenus, et va poursuivre son chemin parlementaire au Sénat.