Quel engouement pour le sacre de Miss Martinique devenue Miss France !
La Martinique exulte.
Mais cet enthousiasme ne lève aucune des hypothèques identitaires en place depuis des décennies.
Qu'une miss bo kay triomphe au niveau français est localement source de fierté ( légitime ). Cela flatte un sentiment de patriotisme plus ou moins affirmé selon les personnes. L'événement conforte un sentiment national martiniquais plus ou moins diffus.
Pour autant, cela ne renforce en rien le sentiment de francité. Autrement dit, le sentiment d'appartenance à l'ensemble national français.
Le constat demeure: très peu de Martiniquais déclarent spontanément, tripalement, intimement, être français tout autant que martiniquais. On est, d'abord, avant tout et surtout, d'ici.
Quand le coeur et l'âme crient, c'est l'être martiniquais qui est proclamé d'emblée. Ex-abrupto. Ce qui fuse est prioritairement un souffle collectif né d'une topograhie de mornes et de ravines.
Aucune ambiguité identitaire n'est donc levée.
Aucun confusionnisme statutaire n'est élucidé.
Plus de France ou plus du tout de France ? La plupart des habitants de l'île aux fleurs souvent fânées depuis la lecture de Fanon continueront de vouloir une chose et son contraire. Selon les nécessités, les besoins et les époques.
Reste une évidence contradictoire. Entre les deux options à disposition: " être pleinement martiniquais " et " être pleinement français ", ce qui surgit inévitablement, c'est le moment d'un conflit d'intérêt. On s'en est tiré jusque là par des contorsions, convulsions, adaptations et quelques reniements. Le zanzolage est une étrange maïeutique. Entre voix de la passion et voie de la raison, tout le monde finit par se prendre les pieds dans le tapis. Et tout un peuple trébuche en toutes occasions de choix fondamentaux, structurels, pour l'histoire.
En fait, les bienfaits de l'élection de Miss Martinique désormais Miss France sont avant tout thérapeutiques.
Et à usage interne.